Le film a donc à la fois un pied dedans et un pied en dehors du mouvement :
- ce sera encore le cas avec La Strada, puis Les Nuits de Cabiria en 1957 (films qui ont au moins le mérite, du point de vue de l’orthodoxie néoréaliste, de mettre en scène des pauvres et des humiliés, saltimbanques ou prostituées), et même d’une certaine manière avec La Dolce Vita, chronique ironique et désabusée de la jet-set romaine, avant le grand basculement que représentera Huit et demi pour l’esthétique fellinienne.
Les Vitelloni amorcent bien un glissement
- qui verra Fellini gagner progressivement son identité d’auteur, partant s’émanciper du courant qui le vit faire ses débuts dans l’industrie (notamment comme scénariste de Rossellini).
- Oui,néanmoins, le film appartient par bien des aspects au courant néoréaliste qui après tout se poursuivra lui-même au-delà de l’année 1954, avec par exemple des films comme Rocco et ses frères de Visconti (1960) ou les premiers longs-métrages de Pier Paolo Pasolini et de Francesco Rosi, au moins par certains de leurs aspects.
Les Vitelloni entretiennent des liens discrets mais réels avec le cinéma de Vittorio De Sica :
- le choix de Franco Interlenghi pour interpréter le jeune Moraldo – le personnage le plus proche de Fellini lui-même, et qui préfigure par bien des aspects la figure du jeune homme provincial qui partira tenter sa chance à la grande ville, que l’on retrouvera une quinzaine d’années plus tard descendant du train dans Roma.
- Interlenghi fut en effet, à quinze ans, le bouleversant interprète du jeune Pasquale dans Sciuscià de De Sica, histoire typiquement zavattinienne de deux adolescents cireurs de chaussures se livrant à divers petits trafics pour survivre dans la Rome de l’après-guerre
Un film sans vedette mais qui en produisit
- Fellini souhaitait voir De Sica lui-même interpréter le rôle du vieux comédien homosexuel qui tente de séduire Leopoldo. le comédien avait sans doute compris que la production était désargentée, de même qu’il pouvait craindre d’être assimilé à un rôle d’homosexuel, chose encore difficile, à l’époque, à faire accepter au public.De Sica aurait rendu, pour le coup, le personnage du vieux cabotin réellement séduisant, ce qui changeait la signification de la séquence,
- Sordi, auquel Fellini tenait pour le rôle d’Alberto, avait alors la réputation de faire fuir le public.Il finit par devenir une vedette, et notamment grâce aux Vitelloni