Atelier d'écriture
Association Base Arts Millau
Les ateliers et les textes écrits
2024 2025

André Gide : « L’art naît de contraintes, vit de luttes et meurt de liberté. »
On me demande souvent ce que l'on fait dans un atelier d'écriture, d'un air perplexe, dubitatif, curieux. Mais qu'est ce qu'un groupe de personnes peut trouver à se réunir pour écrire ? Après tout l'écriture n'est-elle pas d'abord un acte personnel? Oui, bien sûr, mais nos écrits prennent voix dans leur lecture, dans le partage de nos mots.
Alors voilà, nous nous réunissons chaque semaine pour faire naître le plaisir de ce drôle de phénomène de la création à partir de consignes d'écriture qui laissent libre de s'exprimer notre imaginaire par des mots, des phrases, des histoires, des poèmes, des lettres. Nous les lisons à voix haute et les partageons avec bienveillance et sans jugement.
Nous repartons riches de nouvelles résonances sur nous-mêmes, des autres, riches de sensations, d'émotions, de sens à donner à la vie.
Joëlle Compère Dray

À la manière de Kerouac

La voiture roule mécaniquement, elle se crispe sur le siège, elle se tait, chaque seconde l'éloigne de la séparation, elle est jeune, elle a quitté ses parents pour la première fois pour des vacances mais la joie est restée dans la gare alors elle se ratatine sur sa tristesse, pourquoi, pourquoi, une larme coule sur sa joue droite, elle laisse son regard accompagner le défilé monotone et insipide des champs, des bosquets, le ciel s'obscurcit, l’ombre gagne du terrain, elle aperçoit un troupeau de vaches aussitôt arraché à sa distraction par une haie, les larmes pleurent sur son visage, elle ne bouge pas elle tient sa tête obstinément tournée vers la fenêtre, il ne faut pas qu’on voit qu’elle pleure, pourquoi je pleure, je ne sais pas, les nuages dévalent vers l'arrière de la voiture , que faire, je suis triste, paralysée, papa maman au secours, je ne savais pas que la nuit était si noire je ne savais pas que tout est vide dans la campagne, où sont les loups? j’ai peur, au secours, je ne peux rien dire, mon cœur éclate, je ne savais pas qu’il contenait tant de peine, je ne sais pas ce qu'il y a au bout de la route, c'est les vacances c’est triste les vacances

SG
J’allais prendre le car où ? le car à la gare , à la gare des trains, mais y’en a-t-il un au départ…ben oui puisqu’il faut le prendre pour aller où je vais.Je vais où, vers la me,le sud quoi donc direction Montpellier.Les horaires sont affichés,il n’y a qu’à regarder,noter,prendre le ticket,monter dans le bus et se laisse porte jusqu’au sud.Dans une ou deux heures,place de la gare ou pousser jusqu’à la mer.Ce serait mieux : le sud, le bleu,le sable,l’iode,l’eau salée.C’est vraiment partir,se dépayser,visiter,flâner,rêver,s’amuser ou s’embêter.Si je pars faut que je revienne,une fois arrivée, se renseigner,profiter et se rembarque Chemin du retour, paysages à l’envers,c’est le soir.Je suis partie au matin , destination gare du départ – STOP – arrivée.

Monique
Odeur de chocolat et d’orange mêlés,parfum inérable de l’enfance jamais oublié,effluves d’oranges pressées,cueillies,écrasées..je ne sais.Arômes unis,mariés,épousés – zénith chaud,mousseux,crémeux,réfectoire bruissant,roucoulement des tourterelles,tic tac de l’horloge,robes des religieuses frottant le plancher.Têtes dans vapeurs chaudes,volutes de fumée,tase sur la nappe,soucoupe,serviette sur genoux…l’odeur,l’odeur prenant tout : narines dilatées,gouttelettes de rosée,d’écume chocolatée et l’orange, l’orange.Pas de couleur juste l’odeur, l’odeur mais si prenante,glissant dans la gorge,fumerolles,lèvres portées à la tasse,doucement lapent,langue essuyant,lèvres se léchant,saveur retenue,contenue…presque boire à la pépie,ne vouloir jamais finir.Levant la tasse haut,glissant les dernières gouttes, l’essorant presque et longtemps longtemps…on oublie la jolie robe,le sapin scintillant,les chants de noël.
La tasse était si petite,comment pouvait elle en contenir tant, l’orange aussi elle s’appelait mandarine ou clémentine.Il n’y en avait qu’une au goûter de noël de l’école primaire.
Monique

Salle de petit déjeuner. Pierre Bonnard