QUE CALOR LA VIDA
Quand la porte s’ouvrit la moiteur me terrassa. Jamais je n’avais ressenti cela. Une touffeur insupportable tombait du ciel, montait du sol, se glissait dans le moindre recoin comme une vague de vapeur lourde, insidieuse, écrasante.
Ma curiosité s’estompa devant une difficulté que je n’avais pas prévu. Accablée, je me figeai . Déjà la sueur ruisselait sur mon corps, dégoulinait de mon front, coulait dans mes yeux provoquant un désagréable picotement. Je m’essuyai d’un revers de main.
La sensation était étrange, comme si un vent immobile m’assaillait, comme si des ondes étouffantes se succédaient. Entre deux pics, une chaleur moindre rendait plus sensible l’ardeur calorique du pic suivant.
Je ne vais pas survivre.
Les mains moites, les pieds enflés, la gorge desséchée, avachie, liquéfiée, épuisée, amollie, consternée… je subissais dans la mauvaise humeur la loi des humeurs corporelles, salive rare, larmes absentes, sueurs abondantes.
Que suis-je venue faire dans cette galère?
La lumière agressive vibrait dans les blancs translucides. L’air avait une étrange odeur d’humide. Ce n’était ni l’odeur des pins, ni celle des châtaigniers en automne, ni celle des pommiers après les giboulées printanières. Une odeur fauve et suave, salée, comme une putréfaction. Un peu l’odeur d’un marécage.
Autour de moi, cela s’agitait, on se bousculait. On s’envoyait des signes. On rassemblait ses biens. Les plus pressés déjà debout s’impatientaient. On distinguait les efficaces, les encombrés, les impuissants, les tolérants, les protecteurs, les égoïstes.
Moi, je n’étais rien, rien de tout cela, rien d’autre qu’une une tête vide sur un corps mou.
Je laissai faire, incapable de mouvements.
Le vide se faisait peu à peu autour de moi. Il allait bien falloir que moi aussi je rejoigne le tarmac. Que je descende, que mes pieds foulent ce sol brûlant de Douala. Je ne pensai qu’à une chose, une douche, mais avant il y avait la douane. Le nom de la rupture!
Ce matin je quittai Paris sous la neige. Du hublot j’avais admiré le quadrillage des champs bordés de haies où contrastaient des espaces très blancs et d’autres au blanc délayé dans un camaïeu de gris et de bruns. C’était beau et triste, c’était l’hiver.
En cette fin d’après midi, ici, tout palpitait. La lumière tombait dru du ciel, pas une ombre, pas un coin de répit ; les gens s’apostrophaient bruyamment, s’étreignaient, se bousculaient.
Je fus prise de vertige. Je venais de réaliser que j’étais là pour deux ans, à seulement 450 kilomètres de l’équateur
Que calor la vida…